Une étude inquiétante met en lumière une forte contamination par les PFAS dans le sol sous l’usine Lubrizol

Au cœur de la vallée de la chimie en Normandie, une découverte alarmante soulève de lourdes questions sur la qualité environnementale et la gestion des risques industriels. Une récente étude menée en juin 2025 dévoile une contamination massive aux PFAS, ces polluants éternels, dans les sols et eaux souterraines sous l’usine Lubrizol à Rouen. Avec des concentrations jusqu’à 872 fois supérieures aux normes européennes, cette pollution révèle un défi majeur pour la santé publique et la préservation des ressources naturelles dans une région déjà marquée par une forte industrialisation.

Concentrations alarmantes de PFAS sous l’usine Lubrizol à Rouen

Les relevés d’analyses des eaux souterraines, réalisés à la demande de la préfecture de Seine-Maritime, exposent une situation particulièrement préoccupante. Sur une dizaine de points inspectés, tous présentent des niveaux de PFAS dépassant largement la limite de potabilité fixée à 100 ng/L. Dans certains secteurs, la somme des 20 PFAS ciblés atteint des taux records, comme celui à 87 175 ng/L, un taux 872 fois supérieur à la norme européenne. Une pollution d’une intensité comparable à celle récemment identifiée au site Arkema de Lyon, un autre acteur historique de la chimie en France.

Particulièrement inquiétante, la forte présence de PFOA, un composé cancérigène et persistant, atteint jusqu’à 2 308 ng/L, soit 23 fois au-delà de la norme réglementaire. La toxicité de ces substances, utilisées depuis des décennies dans divers secteurs industriels regroupant entre autres TotalEnergies, BASF, Solvay ou encore Sanofi, incite à redoubler de vigilance et à questionner les pratiques passées sur ces sites.

découvrez les résultats alarmants d'une étude révélant une importante contamination du sol par les pfas sous l’usine lubrizol. enjeux environnementaux, risques pour la santé et appels à l’action.

Origines potentielles et débats autour de cette contamination persistante

Si l’incendie majeur qui a affecté l’usine Lubrizol en 2019 avait déjà alerté sur la présence de polluants, les analyses plus récentes montrent que les concentrations de PFAS ne se limitent pas à la zone incendiée. Certains experts, à l’image de Paul Poulain, spécialiste des risques industriels, avancent que cette contamination pourrait résulter en grande partie des mousses anti-incendie fluorées utilisées lors du sinistre, lesquelles contiennent de fortes doses de PFAS capables de migrer sur plusieurs kilomètres dans les sols et nappes phréatiques.

LIRE  Quatre Bretons soutiennent les ambitions d'un club normand en quête de montée en N1

Cette hypothèse contraste avec la position officielle de Lubrizol, qui affirme ne pas utiliser ces composés dans ses processus de fabrication, tandis que la préfecture souligne le manque de données historiques sur la présence de PFAS avant 2019, rendant difficile toute attribution définitive. La région se trouve ainsi face à l’un des paradoxes des polluants dits « éternels » : une contamination très localisée, mais dont les effets perdurent, quelle que soit leur origine exacte.

Impacts environnementaux et enjeux pour la gestion de l’eau en Normandie

Au-delà du site industriel, la diffusion des PFAS pose une véritable menace pour l’environnement normand. Ces substances chimiques peuvent migrer vers la Seine et infiltrer les réserves d’eau potable, impactant ainsi la santé des populations locales. Les collectivités telles que Veolia, Suez ou Air Liquide, impliquées dans la gestion des eaux, suivent de près cette problématique qui suscite de multiples interrogations sur la qualité de l’eau distribuée, comme dans plusieurs communes récemment mises en alerte dans la Seine-Maritime.

Une ressource fragilisée qui rappelle l’importance d’actions concertées, notamment pour préserver les lieux de baignade en Normandie, fréquemment appréciés pour leur propreté, comme le souligne un dernier bilan régional disponible ici. Par ailleurs, la contamination évoque aussi des drames environnementaux récents, à l’image des porcs décimés dans des exploitations locales, liés à la qualité des cours d’eau détaillés dans cet article.

Les défis de la dépollution et les responsabilités des industriels

L’élimination des PFAS, du fait de leur résistance chimique et de leur mobilité dans l’environnement, représente un défi technique et financier majeur. Le pompage et le traitement des eaux contaminées apparaissent comme les seules solutions possibles à court terme pour limiter la propagation dans la Seine et au-delà. Néanmoins, cette opération soulève la question de la répartition des coûts, entre les industriels du secteur tels Arkema, Lubrizol, TotalEnergies, et les collectivités locales.

LIRE  Tourisme : Les îles Anglo-normandes à l'aube de la disparition de la carte d'identité ?

Christophe Holleville, figure active de l’Union des victimes de Lubrizol, redoute que l’effort financier incombe davantage aux contribuables, en raison d’un manque d’engagement des entreprises à assumer leurs responsabilités. Dans un contexte où les préjudices environnementaux s’ajoutent aux répercussions sanitaires, la question de la transparence et de la rigueur dans le suivi de ces sites devient cruciale.

Surveillance renforcée et perspectives d’évolution réglementaire

La préfecture de Seine-Maritime assure un suivi biannuel des eaux souterraines sous le site Lubrizol, affirmant que les normes de potabilité ne s’appliquent pas directement à l’aquifère concerné, car il n’est pas actuellement utilisé pour l’alimentation en eau potable. Toutefois, la reconnaissance de la persistance des PFAS dans l’environnement a poussé au renforcement des contrôles et à une meilleure collaboration entre autorités, industriels et associations environnementales.

Les cadres réglementaires nationaux et européens tentent d’adapter leurs seuils et méthodes d’analyse pour mieux appréhender la complexité de ces polluants. Ces efforts s’alignent avec les initiatives d’acteurs majeurs comme Michelin, qui s’engagent dans une transition vers une industrie plus durable et respectueuse de l’eau et des sols. La vigilance reste toutefois de mise, alors que cette pollution soulève des interrogations sur les pratiques passées, actuelles, et les impacts futurs.